Vendredi 6 décembre
Aurélie Godard est médecin anesthésiste et réanimatrice travaillant pour Médecins sans frontières. Elle a effectué trois séjours à Gaza depuis le début de la guerre. Le 11 novembre dernier, elle a envoyé un message à ses proches et ses amis, qui a été publié par Libération. Elle y décrit les conditions de vie des Palestiniens, les morts et les blessés de guerre, la densité de la population dans les rares zones considérées comme sûres, la propagation de la bronchiolite chez les bébés, les tentes usées ou déchiquetées, incapables de braver les intempéries. Elle raconte les histoires tragiques de ses patients et de ses collègues (chacun a la sienne), les aides et les vivres qui pénètrent au compte-gouttes dans l’enclave, la désorganisation de la société palestinienne privée de police et de gouvernement, les groupes armés qui pillent les camions pour revendre les produits au marché noir. Elle rapporte aussi les récits venant du Nord qualifié d’enfer : « Il semble assez clair que les Israéliens ne laisseront pas les Palestiniens retourner sur leurs terres. Dans le Nord, les attaques sur les hôpitaux n’ont jamais cessé. Les médias ont-ils fait mention des tanks tirant sur un hôpital rempli de malades ? Pas vraiment. Combien d’entre vous savent en revanche que des supporters de foot israéliens ont été pris à partie à Amsterdam ? Sans doute beaucoup plus… ».
Le témoignage d’Aurélie Godard est précieux par son authenticité et sa légitimité. Son message n’épargne personne, même s’il pointe la responsabilité d’Israël dans le drame de Gaza. L’anesthésiste décrit ce qu’elle voit et ce qu’elle entend. Si parti pris il y a, il est celui de l’humain. Sa voix ne servira à rien, sans doute. Elle se dispersera dans la brume de l’omerta, des lâchetés et des compromissions. Mais elle aura parlé, Aurélie Godard, comme elle aura soigné. Et en cela, elle rachète un peu de notre humanité.