Le Coq de Sioufi
Un coq résiste. Le dernier. Anachronique.
Obstiné. Dans la montée Sioufi qui mène au jardin du même nom, il existait dans
le temps une série de vieilles bâtisses à flanc de colline en dessous de la
route, auxquelles on accédait par des escaliers raides qui conduisaient à un
dédale de paliers et de terrasses. Ces constructions étaient habitées par une
population pauvre, à laquelle se sont ajoutés des travailleurs immigrés au fil
des décennies.
Après la fin de la guerre civile, j’ai vu
disparaître l’un après l’autre ces vieux immeubles, remplacés par des tours résidentielles
destinées à des habitants plus fortunés. À présent, il n’en reste plus qu’un
seul, ultime témoin de l’époque d’avant-guerre, et comme pour symboliser cette
survivance archaïque, chaque fois que je passe dans le quartier le matin, j’entends
un chant de coq qui semble défier le flot de voitures engouffrées sur le
boulevard Pierre Gemayel en contrebas.
Combien de temps tiendront encore ce coq et le bâtiment qui l’abrite ? Très peu sans doute. (6/11/25)